Saint Seiya
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Tout le monde y passe, apparemment.

Asgard, excusez le jeu de mots, n'est pas blanc comme neige: il y a des criminels, des lois injustes et plein de choses idiotes qui s'y passe, comme n'importe où dans le monde. Et comme n'importe quelle vraie communauté qui se respecte, il y a la prison.

Je ne sais pas si tout le monde y passe vraiment, mais pour une raison inconnue, un des formateurs s'est mis en tête de m'y emmener pour un sorte de visite guidée, que je sache comment ça fonctionne et où ça se trouve en cas d'urgence. Pas une mauvaise idée du tout, je me demande simplement si c'est vraiment nécessaire. Après tout, je ne suis pas un Guerrier divin, l'intéret est là mais qu'en est-il de l'utilité? Les chances que je ne revienne jamais ici sont énormes. Alors pourquoi? Ai-je tort de croire qu'il y a une autre raison à ma présence ici?
On dirait que oui, car le formateur ne fait que me parler du fonctionnement des cachots. J'observe les cellules, vides pour la plupart, en l'écoutant d'une oreille distraite. Il explique qu'il me voit bien m'occuper de ça, poursuivre les criminels pour les ramener ici. Pourquoi pas? J'ai toujours été rapide.
Je commence à poser plus de questions quand je ressens un cosmos étrange. Étrangement puissant, surtout, mais ça ne m'a pas l'air très commun. Chaotique, dérangé, mais pourtant si naturel qu'il en est serein. Si les animaux possédaient du cosmos, si les prédateurs pouvaient s'y éveiller, ça ressemblerait exactement à ça. Curieuse, je tente de le retracer plus précisément.

-Wanda, qu'est-ce que tu fais?

-Qui est le prisonnier là-bas?

-Quoi?!

Presque à l'aveuglette, je piste l'énergie avec toute l'attention possible. J'arrive devant un cachot à l'écart des autres, éclairé par aucune lumière. Il n'y a qu'une toute petite embrasure et j'y jette un coup d'oeil timide, ne sachant pas trop à quoi m'attendre.

Deux éclats verts percent dans l'obscurité. Deux yeux qui me regardent. Je recule.

-C'est Karim, un serviteur de Loki. On l'a capturé il y a quelques années quand il s'est attaqué à Magnir seul. C'était... spécial, il a pas eu le temps de faire bien du dégâts mais l'arrêter n'a pas été facile. Il est... on ne veut pas le voir sortir de là, tu comprends?

Je hoche la tête. Je n'ai pas trop envie de faire face à ce Karim. S'attaquer à un village seul, qui pourrait être assez fou pour tenter ça? Je ne peux même pas me battre, ma condition physique est pourtant on ne peut plus parfaite. Qu'est-ce que ça a pris pour le capturer? À bien y penser, je ne veux pas savoir. Je ne suis qu'une apprentie après tout.
Le formateur me sourit et le fait signe de reculer, je m'exécute promptement mais alors qu'il s'apprête à en faire autant quand son visage se crispe. Il baisse les yeux et j'en fais autant sans trop comprendre la peur qui l'habite. Un long ruban noir lui enserre la cheville. Et il vient de sous la porte du cachot.

-Impossible... nous les avions coupés...

Le formateur s'appuie soudainement sur son autre pied en titubant, clignant des yeux comme s'il avait de la difficulté à les garder ouvert. Je sens son cosmos diminuer drastiquement, et il me pousse plus loin en murmurant:

-Wanda, sors d'ici. Préviens Asgard... Karim ne doit pas s'échapper...

Et il s'écroule. Je recule encore plus en étouffant un cri, le visage caché entre mes mains, jusqu'à disparaître dans un recoin d'ombres. Comme animé par une vie propre, le bout de ruban se déroule et s'éloigne du formateur, puis se redresse et grimpe contre la porte, s'approche du verrou, et le bout du tissu noir s'introduit dans la serrure. Une seconde passe, deux secondes, puis trois, j'observe la scène sans bouger, interdite devant ce spectacle. Je devrais fuir... prévenir Asgard... mais je ne sais pas si j'en aurais le temps. N'y a-t-il pas des gardes à prévenir? Mais si je crie, n'y a-t-il pas des chances que je sois la prochaine victime du ruban? Quelle peut bien être la portée de ce truc?

Un déclic me fait sursauter. Dans un long grincement angoissant, la porte s'ouvre.

Au début, rien ne se passe. J'en suis presque à me demander s'il y a encore quelqu'un dans le cachot. Mais un bruit de pas, très lent et irrégulier, se fait entendre et une silhouette amaigrie apparait, puis se précise à mesure que le prisonnier s'approche de la porte. Il s'arrête, s'appuie contre la porte.
Je ne croyais pas voir pareille horreur pendant ma vie.

Pas bien grand, horriblement maigre bien qu'il a sans doute déjà été relativement musclé, une lueur tremblotante semble habiter les yeux de Karim alors qu'il continue d'avancer. Il est pieds nus, couvert de loques et ce qu'il reste d'une capuche rouge couvre le dessus de sa tête, cachant ses cheveux si cheveux il y a. Je suis moi-même plutôt pâle, trait de nationalité obligé, mais lui est pire, il est blême. Sa peau est de la même couleur que la cendre, presque grisâtre, et est craquelée à plusieurs endroits sur son visage. Visage que j'ai d'ailleurs de la difficulté à discerner correctement: il est caché par des bandages noirs éparpillés ça et là, comme défaits avec le temps. Deux rubans sont collés à chacun de ses coudes et ses épaules et traînent lamentablement par terre. L'un d'eux est bien plus long que les autres et je reconnais le ruban ayant déverrouillé la porte.
Pourtant, malgré son allure maladive digne d'un cadavre et son équilibre précaire, l'énergie qu'il dégage est déstabilisante: ses yeux verts brillent de vigilance, voire même de santé, et son cosmos pourtant si faible il y a peu est devenu incroyablement puissant. Doucement, les rubans sur ses bras se redressent et j'en distingue quatres autres dans son dos. Je pense à Mikaël, il me semble qu'on avait vu un film avec un truc semblable... je n'arrive pas à m'en souvenir. Là, ce n'est pas un film, ce qui se trouve devant moi est on ne peut plus vrai.

Je respire profondément pour me redonner de la contenance. Grosse erreur.
Les huit rubans se redressent et leur pointe se tourne dans ma direction dans un bruit de froissement. J'en suis presque à m'attendre qu'ils se mettent à siffler comme des serpents tant ils agissent de façon semblable. L'homme qui les contrôle se retourne très lentement, alors que le ruban sur son épaule s'avance vers moi. Je tente de bouger, pour m'ôter de sa trajectoire et tenter de m'échapper, mais la peur me cloue sur place. Le tissu s'arrête à quelques millimètres de ma joue, je retiens mon souffle, je n'ai jamais eu aussi peur... et il s'éloigne. Suis-je vraiment assez bien cachée pour lui échapper? Moi et les coins sombres, ça fait deux, un peu plus et je brille dans le noir. Comment peut-il me rater?

Peu importe, car il se dirige vers la sortie. Bonne chose ou pas, je vais pouvoir sortir sans être vue mais lui aussi, j'ignore où se trouve les gardes et... au moment où je formule ma pensée, j'entends un vague bruit, familier depuis le début de la formation à Asgard: un corps qui tombe sur le sol. Et un deuxième. Rien de plus. Pas un cri, rien. Et le cosmos agressif croît un peu plus.

Non, au diable Asgard, je n'arrête pas ça. Ils penseront ce qu'ils veulent, j'attrape le formateur parce qu'il est quand même sympa et je sors d'ici, on fuit et on ne revient jamais.
Je cours et m'agenouille près de lui pour lui attraper les épaules et l'aider à se relever. Son teint est blanc comme neige et il ne respire plus. Je le lâche et il retombe par terre, sans vie.

-Non...

Le reste se passe très vite.

Il y a un grand choc au niveau de ma hanche et le coup me projette plus loin. Je frappe le mur avec violence et un cri s'échappe de ma gorge alors que je m'écroule. Surprise plus qu'autre chose... j'ai été frappée mais je ne ressens pas de douleur là où il y a eu l'impact. Je passe les doigts sur ma hanche perplexe. Je ne les sens pas. Elle est engourdie.

Péniblement, je me relève et aperçoit mon agresseur. Karim marche vers moi, entouré de ses rubans. Un peu tard pour constater qu'il ne s'agit pas de vulgaires bouts de tissus, mais... je ne pensais pas qu'ils pouvaient avoir autant de pouvoir. Pas tout à fait l'image que j'avais en tête en pensant à un type qui se bat avec des rubans.

-... Wanda...

Sa voix me donne des frissons. À peine plus qu'un murmure, comme s'il avait perdu la voix, mais il met un effort considérable pour prononcer ce simple mot. J'ai cru discerner un accent, mais c'est difficile à dire. Comment peut-il connaitre mon nom? L'a-t-il entendu auparavant? C'est vrai que le formateur l'avait dit avant qu'il... qu'il soit... je serre les poings. Pour une fois que je commencais à apprécier quelqu'un. Je ne laisserai pas un mec comme lui s'en tirer impunément.

-En garde, montrum. Tu vas me le payer!

Il fait un pas de plus et ses rubans se déploient de chaque côté de lui comme les pattes d'une araignée. Il ne semble même pas avoir envie de se battre. Aucune posture, aucune énergie significative, rien. Il est puissant et agressif, mais ce n'est que grâce à son cosmos que je le sais. Si je ne me fiais qu'à mes yeux, je me contenterais de le bousculer pour sortir. Étrange combinaison. Il ne doit pas être très porté sur les attaques physique... avec les armes qu'il possèdent, il n'en a sans doute pas besoin.

-Enfant d'Asgard... Je vais devoir te tuer...

Une phrase complète, et chaque mot est plus difficile à prononcer que l'autre. Comment fait-il pour parler plus ou moins normalement s'il éprouve de la difficulté? Il n'est définitivement pas normal... et personne ne me vole la vedette ainsi, me menacer après avoir tuer quelqu'un que j'appréciais? Non, jamais. Je ne serai pas sa petite victime.

-Grossière erreur. Je suis plus qu'une enfant d'Asgard.

Je n'ai jamais remporté un combat. Je suis une athlète, pas une guerrière, je ne suis pas faite pour ça. Mais face à une telle menace? Je veux bien faire l'effort.
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Si seulement il n'avait pas ses rubans. Ce serait tellement plus facile.

Dès qu'il se met à les utiliser et que j'ai à m'en défendre, je comprends son potentiel et j'arrive à le cerner un peu mieux. Deux rubans m'entourent et je fais courir une vague de froid sur mes bras. Dès qu'ils me touchent, une épaisse couche de glace les recouvrent et je les plaque contre le mur où la glace continue de se propager jusqu'à ce que les bouts de tissus y soient complètement encastrés. Et de deux. Plus que six. Et six, c'est beaucoup.

Un troisième ruban s'enroule autour de mon poignet et cette fois, pas d'élément. Je tire de toutes mes forces et Karim perd l'équilibre, j'en profite pour foncer vers lui et lui asséner un coup de poing en plein visage. Je ne suis pas bien forte, mais il est si fragile que c'est pleinement suffisant. J’enchaîne avec un coup de pied, il étouffe un gémissement en reculant de quelques pas et je viens pour lui porter un dernier coup... mais mes doigts ne bougent pas. Je n'arrive pas à serrer le poing. J'observe ma main en paniquant, sans comprendre ce qui se passe. Elle est toujours prisonnière du ruban noir, et le bout de mes doigts est bleuté, tirant presque sur le violet.
Soudainement, je suis prise de vertige. Suis-je bête! Karim draine mon énergie depuis que nous avons commencé à nous battre! C'est à ça que servent les rubans! C'est sans doute comme ça qu'il a réussi à tuer les gardes et le formateur, et... n'étant pas nécessairement aussi bien éveillés au cosmos qu'un possible guerrier divin en devenir en plus de ne pas porter autant d'armure, ils ont été des proies faciles. Il doit y avoir une autre explication, plus complète ou plus logique... mais je n'en vois pas d'autre. Pour l'instant ce n'est pas ma priorité.

Ma main se couvre de glace, emprisonnant le ruban. Je me concentre et laisse mon cosmos se propager jusqu'à mon adversaire, et même si ça semble fonctionner ça prend beaucoup trop d'énergie pour le faire, comme si je tenter de hurler sans air dans mes poumons. Je frappe le mur de mon poing, fissurant la glace et le ruban se déroule, comme si la vie l'avait quitté. Un serviteur de Loki qui n'aime pas le froid? Pauvre lui... mais je peux m'en servir à mon avantage.

Je dois récupérer avant. S'il me touche à nouveau je risque d'être handicapée pour de bon. Encastrant ses pieds dans une épaisse couche de glace quitte à ne pas pouvoir immobiliser ses armes les plus mortelles, je prends la fuite et me cache dans un des seuls endroits disponibles: un cachot vide. Ainsi au calme, je contemple ma main paralysée. Elle a toujours cette même couleur inquiétante, mais le froid du nord n'aide pas. Je suppose que ça ira... mais je ne peux pas me permettre de retomber dans le panneau une deuxième fois. Je ferme les yeux en me concentrant, et la glace commence à recouvrir mon corps, formant une armure improvisée. Ce n'est pas très confortable, mais ça me défendra. Il ne passera pas au travers de ça.

-Balett av Upplysta Jungfrun...

Je sors de ma cachette. Karim est un peu plus loin, il se retourne lentement et me regarde, à peine étonné. Les deux rubans coincés contre le mur se sont libérés et celui que j'ai congelé semble traîner bien bas, mais celui qui les dirige semble... absent. Il titubait déjà beaucoup avant, mais là? Quelque chose ne va pas. Qu'importe, puisque je vais en finir. Je m'avance.

-Une telle abomination ne devrait pas exister. Je vais y mettre fin sur le champ.

Mais...

-Je t'entends. Tu penses faire le poid?

Son parler! Il a changé, ce n'est pas normal! Je cache mon étonnement comme je le peux et me remets en garde, bien déterminée à ne pas laisser ce grossier personnage avoir l'avantage un deuxième fois. Il peut bien parler si c'est ce qu'il veut, mais ses belles menaces ne le sauveront pas.

-Karim, c'est ça? Quand j'en aurai fini avec toi tu pourras te demander si je fais le poids ou non.

-Je t'attends... Wanda.

Wanda. Wonder. Un nom si magnifique désormais écorché, traîné dans la boue, dans la honte d'avoir été prononcé par un si disgracieux visage. Mon mépris est plus qu'évident.

-Aie au moins la décence de t'en souvenir.

Et sur ces dures paroles je m'élance. Pour cette fois, rien que cette fois, je donnerai tout, et on ne doutera plus jamais de moi.

Les murs se couvrent de glace alors qu'une poudre de givre entoure le serviteur de Loki. Un bloc de glace se forme dans mes mains et grossit, grossit, jusqu'à toucher le sol... un immense morceau de glace, mais dans mes mains il est à peine plus léger qu'une plume. Je tourne gracieusement sur moi-même alors que des liens de cosmos jaillissent de mes paumes et s'attachent à la glace.

-Kristall Stjärna Arabesk!

Le bloc de glace suit le mouvement, et quand je lâche prise il fonce à toute vitesse vers Karim. Ce dernier n'a pas le temps de réagir, et il disparaît sous les fragments de glace. Je pousse un long soupir. Ça n'aura pas été facile, mais il ne posera plus problème.

Mais les débris de glace se mettent à bouger. Et des décombres sortent huit bouts de tissus noirs.

Non. Il s'est pris un iceberg! Comment peut-il être encore conscient? Je regarde sans pouvoir bouger alors que les rubans s'appuient au sol, s'accrochent aux murs et tirent Karim hors des débris. Il ne bouge plus du tout, son corps est ballotté par le mouvement instable des rubans qui le retiennent, mais ses yeux sont grand ouverts, et il me regarde. Et il parle, toujours de son ton aussi égale, aussi étrange...

-Une attaque aussi faible ne me fera rien. Tu ne fais que retarder l'inévitable.

Ses rubans se mettent à bouger, et comme une araignée il se dirige vers moi. Je me concentre.

-Satt Av Isen!

Je tournoie et une onde de choc se forme autour de moi, créant une épaisse brume blanchâtre et projetant Karim plus loin, le déstabilisant et le faisant tomber au sol. Maintenant je peux utiliser cette couverture... soit pour m'échapper, soit pour l'attaquer furtivement. Quel choix serait le bon?

Voyons voir. Un homme chelou qui m'attaque, tue des gens devant moi, joue les détraqués mentaux et se retrouve en prison, et la majorité des gens aux alentours prononcent surement son nom avec de la terreur dans leur voix alors qu'ils ne connaissent pas le mien. Oui, on a un différend à régler, et je compte bien me servir de lui pour rétablir l'ordre. Wanda Kylig, celle qui combattit bravement le tristement connu Karim et mis fin à sa terrible menace. Une héroïne. Ça doit bien rendre sur un CV.
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Me déplaçant à pas de loups dans la brume, je repère le cosmos de Karim pas trop loin. Sans ses rubans, est-ce qu'il peut bouger? Si oui, pourquoi ne le fait-il pas? Et sinon... pourquoi ses rubans ne le font-ils pas pour lui? Vu son état il ne devrait pas rester immobile. Du moins, c'est ce que je crois, il est sans doute assez tordu pour trouver autre chose.

J'aperçois quelque chose au sol et je m'arrête. Un ruban étalé en ligne parfaitement droite sur le sol. Et un autre en diagonale. Et un autre. Karim a tissé une véritable toile, et je pourrais parier mes patins qu'il m'attend de l'autre côté.

Quels alternatives s'offrent à moi? Tout congeler serait très simple et très efficace mais j'ignore si j'ai l'énergie pour le faire, surtout à une telle épaisseur sur une telle surface. Alors quoi? Je saute comme une ballerine pour les éviter? Un plan sympa s'il ne contrôlaient pas ces satanés rubans, me retrouver coincée entre deux signifierait la mort assurée. Et c'est trop facile de m'intercepter en plein "vol." Je vais devoir m'en tenir à la première solution... j'ai la tête trop embrouillée pour penser à autre chose. Et si... et si je faisais les deux? Sauter en congelant sur une zone plus limitée et plus restreinte? Je dois m'approcher, c'est dangereux vu mon adversaire mais je ne vois rien avec cette brume, et avec de la chance lui non plus, et même s'il a réussi à en tirer profit il prend très mal les coups physiques. C'est un risque à prendre. Un bon coup à la bonne place et il sera à ma merci.

Je fais disparaitre ma protection de glace et me dresse sur la pointe des pieds. Une éternité semble avoir passé depuis la dernière fois que j'ai dansé, mais une fois que la notion a été gravée en moi il n'y a aucune façon de l'oublier. En sautant entre les deux premiers rubans, un étrange souhait me saisit: je veux me souvenir de chaque pas, chaque chassé et chaque croisement et ce jusqu'à ma mort. Peut-être parce que ça pourrait être bientôt? Je ne dois pas penser à ça, ma priorité c'est donner tout ce que j'ai pour stopper ce serviteur de Loki.

Dès que mes pieds touchent le sol, une vague de givre se propage. En même temps, les rubans se mettent à bouger mais ma glace est plus rapide et les immobilise. Je saute une deuxième fois, mon coeur semble arrêter de battre quand mon pied glisse mais j'arrive à me reprendre et à rester debout. Un ruban se contracte et s'enroule autour de ma cheville mais une puissante vague de froid le repousse et je le paralyse comme les autres. Tout va bien, même si ma cheville me semble bizarre... mais je crois que je suis juste parano. Deux autres rubans m'approchent, j'esquive l'assaut et les emprisonne dans la glace, activant ainsi un autre ruban qui attrape mon poignet et me tire vers le sol. Je tombe et un autre ruban s'enroule autour de ma taille, et j'ai beau me tortiller et me débattre en hurlant, plus ça va et plus mes forces me quittent. Je tente d'invoquer la glace. Rien. Mon cosmos est à plat. Dans un geste désespéré, j’attrape les petites extrémités qui dépassent et fais un nœud avec. Je doute fort de l'efficacité de ce plan, il n'y a aucune raison pour que ça fonctionne, mais... non sans surprise les rubans commencent à se tortiller et j'arrive à me dégager de leur emprise. Pas évident de se concentrer quand ses armes s'attaquent entre elles je suppose... il a un bouton marche/arrêt ou pas? On dirait pas. 

En titubant, je me relève et termine la traversée. Les rubans ne bougent plus, sauf les deux qui semblent se battre entre eux pour se libérer l'un de l'autre, et je me permets enfin de pousser un long soupir de soulagement. Si j'avais su, j'aurais fait ça bien avant.

Je me permets un sourire satisfait. Sourire qui se fige en sentant un tissu se serrer autour de ma gorge.

Pas moyen de me libérer de celui-là. En étouffant un cri de peur, mon regard se pose sur les rubans sur le sol qui ont cessé de s'agiter et qui avancent lentement vers moi. Il y en a sept. Karim a huit rubans. Comment j'ai pu rater ça? Comment j'ai pu croire qu'il se laisserait à découvert comme ça?
Je suis soulevée de terre comme un pantin. Mes pieds frappent dans le vide alors que le serviteur de Loki me retourne et son regard croise le mien, impassible, à peine surpris ou en colère après ma tentative de riposte. Peut-être a-t-il joué le jeu, peut-être qu'au moment même où il a réussi à m'attraper j'étais foutue. Il est toujours immobile, moi aussi mais j'ai plus de difficulté à garder les yeux ouverts. Et il recommence à parler avec difficulté, comme si chaque mot était un défi à prononcer. 

-Pas le poids... M'en souviendrai...

Je ne sens rien du tout. Mais d'un seul coup, mes yeux se ferment et c'est le noir complet...

...

Je me réveille dans un lit avec un mal de tête carabiné. Des formateurs sont tout près, et en me voyant éveillée ils s'approchent pour me demander comment je vais et je leur murmure que je vais bien. Ils m'expliquent ce qui s'est passé, une perte d'énergie trop drastique qui m'a fait perdre connaissance, j'ai eu de la chance de survivre mais c'était la dernière, je devrais m'en remettre bien assez vite. Je pourrais presque croire que ce qui s'est passé n'était qu'un mauvais rêve... mais ils me prouvent le contraire assez vite. Karim s'est échappé et ils n'ont pas été capable de le retrouver. Le formateur et les gardes sont morts. Nous discutons un peu et ils partent, me laissant seule avec mes sombres pensées. Ce salaud a réussi à s'enfuir. Malgré toute la volonté du monde, je n'ai pas pu l'arrêter. Et si Asgard avait tort? Et si je n'avais pas le potentiel pour les rejoindre? Je ne suis pas une guerrière... je ne suis qu'une patineuse doublée d'une athlète.

Le soir même, j'ai repris suffisamment de force. C'est le soir où je m'enfuis pour de bon.
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