Athena avait finalement prit congés d’Eris. Elle avait échangé quelques mots avec Ephraem afin de l’informer de sa décision quant aux informations de la Discorde. Elle ne l’admettrait jamais, mais elle cherchait ainsi à voir ce qu’en pensait l’italien, voir à sa réaction s’il approuvait son idée ou non. Après tout, c’était un vétéran au sanctuaire, il pouvait toujours avoir de bons conseils. L’américaine devait avouer que la perspective de dénoncer aux spectres les actions du dieu qui les dirigeait actuellement était tentant. Juste pour les voir se débattre comme une poule sans tête en essayant de retrouver un semblant d’ordre après de telles révélations. Mais, en l’occurrence- à supposer que les spectres la croient- la poule risquait plus de s’avérer être une hydre. En agissant comme Eris l’espérait, elle risquait de la hisser au pouvoir, et Hadès finirait forcément par revenir. Et les spectres seraient encore capables de reprocher au sanctuaire d’avoir semé la discorde dans leurs rangs. Après avoir salué le chevalier d’or du taureau, elle interpella un messager pour lui demander de transmettre à Azir quand leur entrainement prendrait lieu, et où, avant de se rendre dans son propre temple pour saisir son carnet de notes où elle retranscrit sa rencontre avec Eris ainsi que la décision qu’elle avait prise, se demandant ce qu’en penserons les futurs réincarnations d’Athéna qui poseront leurs yeux sur ce carnet.
Athena s’était rendue à la Palestre en avance. Elle voulait observer le progrès des apprentis avant de s’occuper d’Azir. C’était ici qu’elle passait le plus de temps dernièrement. S’assurer que l’entrainement des futurs chevaliers se déroule bien était capital. Certains d’entre eux allaient peut-être jouer un grand rôle dans le futur. Quand elle aperçut le chevalier du lion, elle laissa les apprentis pour le rejoindre :
« J’ai le pressentiment que les ennuis s'amoncellent à l’horizon. On va avoir besoin de bon combattant… Pardonne-moi, ce n’est pas ainsi que je devrais te saluer. Bonjour Azir, j’espère que tu es prêt à t’entrainer ! »
Lança t-elle à l'adresse du jeune homme en guise de salutations.
Sitôt revenu de son petit voyage à Nice, ses bagages déposés dans son temple et Caramel autorisé à fréquenter 2 pièces de celui-ci (le temps de s'habituer au lieu), Azir reçut une convocation de la part d'un messager officiel d'Athéna. Sur le coup, quand l'homme l'avait abordé pour lui remettre le pli, il avait été à deux doigts d'éclater de rire et de lui répondre qu'un simple SMS suffisait. Seulement, Athena ne possédait pas son numéro, était habitée par une déesse de la Grèce antique, dans un Sanctuaire tout aussi antique malgré les innombrables réparations et restaurations qu'on lui apportait sans doute régulièrement. Et deux ou trois crans au-dessus dans la hiérarchie.
A l'heure dite, le Cinquième gardien prit le parti de faire le trajet en petites foulées, prêt à montrer ses progrès. Il hésitait toujours quant au fait de "défier des dieux jusqu'à la mort", cette seule idée demeurant irréaliste à ses yeux.
La Palestre désormais familière fourmillait d'activité, sous la houlette bienveillante mais ferme d'Hippolyte et de ses sbires. Ici, tous les grades se côtoyaient, se dépassaient. L'idée d'y voir Athena n'avait donc rien d'incohérent, surtout quand on connaissait le tempérament de la jeune femme. Le Lion n'eut aucun mal à la retrouver, mais il se surprit à le faire grâce à son cosmos. Le petit exercice d'espionnage de l'entraîneur avait eu le mérite de piquer sa curiosité sur cet usage peu ordinaire de leur "magie", et depuis Azir essayait de détecter tous les cosmos qu'il croisait, juste au cas où.
Peu désireux de prolonger l'attente, l’Égyptien émergea de la masse compacte des apprentis -sans se douter que son cosmos y luisait déjà comme un phare au milieu des ténèbres. Il s'attendait à des provocations, un défi, quelque chose de pugnace, au lieu de quoi ses premiers mots allèrent à un sombre présage. Le blondinet perdit aussitôt tout sourire, oubliant l'idée de pavaner grâce à son avancée fulgurante en matière de maîtrise cosmique.
"Bonjour Athena..."
Il baissa les yeux, revit son orgueil à la baisse à cause de la douche froide qu'elle lui avait servi. Un novice. Juste un novice.
"J'imagine que ce ne sera pas suffisant, mais il me semble avoir plutôt bien avancé. J'espère juste... ne pas commettre une erreur."
Et si l'armure se trompait ? Combattre, combattre... Verser le sang ? L'armure d'or fendit les airs depuis son temple, comme appelée par cette pensée, pour venir se greffer à son porteur officiel et le détromper. Rutilant sous la caresse des rayons solaires, Azir se détendit alors.
"Pourras-tu m'en dire plus sur la situation des Saints au fur et à mesure de l'entraînement ? Je... J'ai réglé les détails qui m'empêchaient d'être pleinement un chevalier. J'ai quitté la France. Je peux peut-être m'impliquer davantage maintenant."
Il lui coûtait de parler de sa "vie d'avant" comme d'une chose passée et ne cherchait pas à s'en cacher, mais il n'osait formuler la voix haute le simple souhait que tout cela serve à quelque chose, qu'il avait encore de nombreux doutes sur sa fonction. Et elle, censée guider ses chevaliers, détenait probablement un certain nombre de réponses.
Azir expliqua à l’américaine qu’il pensait avoir bien progressé depuis la dernière fois qu’ils s’étaient vus, avant de demander à ce qu’elle le renseigne sur la situation du Sanctuaire. Elle lui désigna l’endroit où ils allaient s’entrainer avant de prendre la parole le temps de rejoindre l’endroit et de se mettre en place :
« J’espère bien que tu as progressé. Je le prendrais très mal si tu ne t’étais pas exercé entre temps. Enfin, au moins je pourrais m’entrainer plus sérieusement que contre les apprentis. Je vais pouvoir y aller un peu plus fort. Je n’ai pas eu l’occasion d’affronter de chevalier depuis que je suis devenue déesse.
Athena s’installa plusieurs pas en face du Lion et éleva doucement son cosmos tout en continuant à parler :
– Eris nous a rendu une petite visite tout à l’heure. Elle nous a fournit des informations, sans rien nous demander en retour, juste de petites conditions. Je le sens très mal, elle doit mijoter quelque chose. Personne n’offre quelque chose sans la moindre contrepartie, surtout pas un dieu, et encore moins la Discorde. Elle a des plans, et je n’aime pas ça. Je n’ai aucune envie de rentrer dans son petit jeu.
Son regard se perdit dans le vague pendant un instant :
- J’espère juste prendre les bonnes décisions…
La jeune femme secoua la tête pour se reprendre. Il était temps de commencer cet entrainement. Elle se mit en position, observant le terrain pour élaborer une stratégie. Apprentie, elle s’était entrainée en Italie, et n’avait aucune réelle connaissance du terrain, tandis qu’Azir devait déjà s’être battu ici sous la tutelle d’Hippolyte.
- C’est pourquoi il est important que je vérifie si mes chevaliers sont prêts au combat. Qui sait ce que l’avenir nous prépare ?
Elle sortit une carte de sa poche qu’elle rendit tranchante et la jeta en direction du chevalier d’or avant de fondre vers son flanc gauche dans le but d’administrer une attaque de corps à corps. Elle démarrait doucement, ceci dit, afin de commencer par évaluer le niveau du jeune homme.
Le malaise d'Azir fut rapidement enfoui sous les propres doutes de la déesse. Celle-ci se semblait distraite, au moins partiellement, au point qu'elle lui servit directement sur la table son entrevue avec une autre déesse, et pas la moindre puisqu'il s'agissait de l'une des plus vicieuses que la mythologie grecque présentait. Le blondinet ne savait comment interpréter cette information : un égarement d'Athena, ou tout simplement une réponse à la demande qu'il avait formulée. Quand celle-ci s'accompagnait d'un presque-espoir mêlé d'un presque-reproche, le Lion préférait avancer prudemment, tâter le terrain.
Sans plus de cérémonie, elle se mit en garde, et le Cinquième gardien se trouva bien aise d'avoir échauffé ses muscles avant de venir. Son regard se porta sur la carte, qu'il esquiva d'un pas de côté avant de se rendre compte de son erreur : une diversion. Alors, dans un réflexe acquis par l'insistance d'Hippolyte auparavant, il leva la main, bloqua le coup tout net, garda sa main dans la sienne. La différence de puissance entre eux le frappa tout de suite, ses muscles crispés par ce simple geste tant l'énergie cosmique d'Athena brûlait naturellement en elle.
Son regard d'améthyste alla chercher le sien. Il voulait la voir concentrée sur lui, sur le Lion en lui, non sur ces obscurs fantômes qu'elle observait planer à l'horizon. Non qu'il se désintéressât du sort du Sanctuaire et des batailles à venir, mais pour les mener il avait besoin d'être fort, de gagner en expérience, et le seul moyen d'y parvenir sur l'instant nécessitait de prouver qu'il pouvait être, si non dangereux, au moins suffisamment menaçant pour qu'elle ait à le surveiller.
"Et toi Athena, qu'est-ce que tu offres ? Quelle contrepartie demandes-tu ?"
Le visage fermé, scrutateur, il éleva à son tour son cosmos. Il ne lâcha le poing de la combattante que pour mieux tenter d'abattre le sien dans ses côtes, vif et puissant, puis d'enchaîner les assauts. Simples, parfois superflus, rarement optimisés encore. Un expert pourrait rapidement voir les lacunes qui parsemaient ses postures, mais au moins son jeu de jambes tenait la route, et avait fait ses preuves contre les apprentis et les plus faibles des chevaliers de bronze, voire d'argent.
A présent qu'il était lancé, il continua entre deux respirations :
"Qui est le débiteur parmi les Saints ? Nous t'offrons notre loyauté, notre quotidien, notre soutien même. Nous devenons "tes" chevaliers comme tu dis... Qu'avons-nous en échange ? Qu'est-ce que la Sagesse peut donner à ses fidèles ? "
Dans sa voix, nulle provocation. Juste l'irrépressible doute et la curiosité de la réponse. Elle semblait le tenir pour acquis, alors qu'il était un Homme, libre, un Lion sauvage. Mais certainement pas "sien". Pourquoi obtempèrerait-il ? Pour qui ?
Avez-vous déjà essayé de marcher à deux endroits en même temps ? Non, bien sur, vous en tête, selon toute probabilité, incapable. Mais imaginez que ce soit possible. Parce que c’était la situation dans laquelle se retrouvait Athena. Si elle avait été totalement sur le combat, la combattante aurait peut-être eu le temps de rendre sa main tranchante afin d’empêcher Azir de la saisir. Mais dans le même temps, elle se rendait à Rodorio, et c’était sa première fois, alors sa concentration n’avait pas été entièrement centrée sur l’entrainement. Cependant, le premier coup du Lion l’aida à se recentrer dessus. L’américaine se ressaisit et rendit son corps tranchant afin d’à la fois se libérer et dissuader le chevalier de continuer ses assauts. Elle recula d’un bond pour se mettre hors de portée des coups du jeune homme. Quelle contrepartie elle offrait ? La déesse en aurait rit. Elle-même n’avait pas rejoins le Sanctuaire pour une quelconque contrepartie, le simple plaisir de se battre contre de puissant adversaires lui suffisait. Alors, certes, pourquoi les Saints et pas un autre camp, comme les Black Knight ? Elle devait avouer qu’il devait y avoir tout de même, au fond d’elle, un désir de protéger les innocents ? Après tout, jamais une armure ne l’aurait choisit autrement, encore moins la dirigeante du Sanctuaire.
« La protection de l’humanité, n’est-ce déjà pas une contrepartie satisfaisante ? L’armée offre t-elle une contrepartie à ses soldats autre que la protection de leur pays ? Et le salaire à la limite. Le Sanctuaire vous offre la possibilité de défendre vos valeurs et de protéger vos semblables plus efficacement que si chacun luttait tout seul dans son coin.
La jeune femme essayait surtout, dans son discours, de détourner le chevalier du Lion de l’entrainement le temps qu’elle s’habitue à cette nouvelle expérience. Elle n’allait pas utiliser ça comme excuse pour avoir baissé sa garde un peu plus tôt, c’était à elle d’apprendre à faire avec, mais rien de l’empêcher d’essayer de gagner un peu de temps pour s’y faire. Comme elle commençait à se sentir plus à l’aise, Athena lança un nouvel assaut. Elle fondit à pleine vitesse vers le flanc gauche d’Azir, fit mine de s’apprêter à un administrer un puissant coup, mais changea de cible à la dernière minute pour faucher ses jambes.
- Jurer fidélité à la déesse Athéna, c’est jurer fidélité à l’humanité. Te battre pour le Sanctuaire, c’est te battre pour tous ceux qui n’ont pas la force de se défendre seuls. Tourner le dos aux Saints… elle soupira, C’est tourner le dos à l’humanité. Mais je ne te jugerais pas si tu décidais de le faire. En outre, se soulever contre nous, se soulever contre l’humanité… C’est une autre histoires…
Puis, comme ses dernières paroles pouvaient sembler menaçantes, elle s’empressa d’ajouter :
- Je comprends que tu puisses avoir des doutes. Que tu te demandes si tu as vraiment ta place ici. Pour être honnête, c’est une question que je me suis souvent posée. Et que je recommence à me poser depuis que je suis devenue déesse. Mais je suis sûre que le temps aura l’occasion de te prouver que tu es bien l’un des notre Azir »
"A quel moment ai-je juré fidélité à Athéna ? Je me souviens avoir été jeté dans l'arène par Hippolyte, malmené par Ariake au nom de je ne sais quelle colère, puis entraîné à blesser, à tuer, quand mon désir est de sauver les autres. Quelqu'un a-t-il jamais pris en compte que mon premier don servait à guérir ?"
Il s'attendait à ce qu'elle évitât ses coups, freina son ardeur pour économiser son souffle et observer ses gestes. Il s'agissait d'une danse, dans laquelle reculer ne signifiait pas forcément perdre ou mourir. Pas cette fois. A un moment, le corps de la guerrière sembla refléter la lumière, comme une lame tournée en direction du soleil. Azir ne se le fit pas redire : elle passait au niveau supérieur.
Un instant plus tard la riposte arrivait, directe, rapide... beaucoup trop évidente. Le Lion maîtrisa son impulsion et bondit de côté pour esquiver de justesse un coup qui l'aurait probablement cloué au sol.
"Pas deux fois de suite !"
Souple sur ses appuis, il la dévisagea avec méfiance. La présence du Néméen à ses côtés s'accentuait un peu plus chaque seconde, au point qu'Athena pourrait finir par percevoir comme une double énergie s'amasser dans ses pas. Bientôt, la créature mythique se fondrait si intensément en Azir que pour ses sens divins il y aurait comme des jumeaux face à elle. Déjà les pieds de l’Égyptien ne produisaient presque plus de sons, légers et rapides. Le Lion silencieux se rapprochait de sa proie pour lancer sa charge : unique, implacable, létale.
Les doigts, puis les poings du Cinquième gardien se nimbèrent se cosmos, laissant de fabuleuses traînées pailletées dans leur sillage invisible à l’œil d'un non-éveillé. Toutefois, le plus déstabilisant dans ce combat se trouvait plutôt dans les iris améthystes du jeune homme. Son regard de plus en plus intense trahissait un oubli de lui-même, une concentration de plus en plus absolue sur Athena et Athena seule. Quiconque oserait interférer finirait coupé en rondelles entre les crocs du Lion, mais ce dernier ne paraissait même pas conscient du phénomène.
"Tu ne comprends pas, déesse. Regulus est venu me chercher. Je sais que ma place est ici. Je n'aurais pas tout abandonné dans l'autre monde si je n'y croyais même pas un peu. Mais toi..."
A ce moment-là, le timbre d'Azir changea légèrement. Un peu plus rauque, un son presque ronronnant, comme les prémices d'un rugissement à sa naissance.
"... Toi qui nous guides et protèges ce monde, tu dois cesser de douter. Nike ne reviendra pas vers toi tant que tu resteras indécise. Ni elle, ni les autres étoiles. Rétablis l'équilibre qui vacille. Athéna."
Pendant une fraction de secondes, Azir venait de toucher directement l'âme de la déesse. Son cosmos frôlait le sien, entrait dans l'univers caché d'une femme qui s'aiguisait chaque jour comme une lame. Il délivra son message, puis se retira aussi vite de ce sanctuaire interdit. Bougea.
Aucun des spectateurs ne put suivre. Le blondinet se déplaça à la vitesse de la lumière et trancha dans l'air. Au début il manqua sa cible, de beaucoup, puis rectifia peu à peu ses coups. A mesure qu'elle essaierait d'esquiver son adversaire pourrait se rendre compte qu'en réalité il quadrillait l'espace de façon à l'amener là où il le voulait, dans un antre dont il détenait le seul accès. Finalement, quand il la pensa acculée, il bondit droit sur elle toutes griffes dehors tel le lion sur la gazelle, visa directement le cœur, la gorge, tout point vital qui pourrait l'immobiliser pour lui permettre de l'achever à sa guise.
Le lion esquiva l’attaque de la déesse sans soucis. Elle n’en était pas vraiment surprise, elle en était encore à tester ses capacités, et peinait à agir sur deux scènes. Aux paroles d’Azir, Athena haussa un sourcil.
« Et personne non plus n’a demandé mon avis avant de décider que je serais la nouvelle réincarnation d’Athéna. Je n’en avais aucune envie moi. Et on m’a jeté en pleine invasion du sanctuaire en guise de bizutage, attendant de moi que je remplisse mon rôle aussitôt, à la perfection et sans m’en plaindre. Personne ne s’est soucié si j’avais d’autres projets. Pourtant, j’ai endossé ce rôle, j’ai accepté mes nouvelles responsabilités, parce qu’il faut bien que quelqu’un le fasse. Quant à ton pouvoir…
Elle s’interrompit un instant et soupira :
- Tu veux que je te raconte ce qui est arrivé à notre dernier chevalier qui se destinait avant tout à soigner ? La vérité Azir, c’est que tu peux te consacrer avant tout à soigner les gens, mais tu dois aussi apprendre à te battre, pour défendre ta vie, défendre celle de tes patients. Parce que nos ennemis, eux, ne se soucieront pas de savoir si tu es un guérisseur ou un guerrier.
Le cosmos du chevalier montait, Athena pouvait le sentir. Elle eu un sourire en coin. C’était comme si son corps savait comment il devait réagir en situation de combat, même si le jeune homme lui-même n’en n’avait aucune conscience. Puis, il attaqua. Il passa d'abord largement à côté d'elle, fondit à nouveau, de façon beaucoup plus juste. Un sourire étira les lèvres de la jeune femme. Ainsi il partait sur des attaques de corps à corps? Bien, elle était sur son terrain. Elle se contenta d'abord d'esquiver les assauts du chevaliers. A chaque nouvel attaque, il devenait un peu plus évident qu'il avait quelque chose en tête, la jeune femme le laissa faire, curieuse de voir où il comptait la mener ainsi. Puis, la pensant acculé, il bondit sur elle. Toujours du corps à corps. Elle n'avait même pas besoin de bouger. Élevant son cosmos, elle enveloppa son corps afin de le rendre tranchant de pied en cap un instant avant que le chevalier ne la touche. Son bouclier ainsi formé ne se contenta pas d'absorber une partie de l'attaque, il blessa l'assaillant en retour.
- Tu ne comprends pas Azir. Le doute fait partit de ma fonction. Je ne dois en aucun cas prendre chacune de mes décisions comme parfaites. Je dois songer à toutes les possibilités, prévoir une action à chaque évènements, je ne dois laisser aucun imprévu, remettre en question en permanence mes actions et mes jugements, afin d’être sûre de prendre les meilleures. Il faut savoir faire la différence entre douter au point de ne pas savoir prendre de décisions, et réfléchir à ses actions afin de pouvoir prendre la meilleure décision au moment nécessaire. Je te rassure, je ne laisserais jamais le doute me paralyser.
Et elle malléa à nouveau son cosmos, l'intensifia au niveau de son bras, afin qu'il soit plus aiguisée que la plus fine des lames. Puis, sans crier, gare, elle chargea à pleine vitesse sur le Lion :
- CUTTING EDGE !
Et elle frappa. Pendant un court instant, son cœur s’emballa en songeant que c’était avec cette attaque qu’elle avait bien faillit tuer son adversaire en concourant pour l’armure du Capricorne et qu’elle était soudainement devenue déesse. Mais ce doute ne dura qu’un bref instant ; elle n’était plus inconsciente du pouvoir qu’elle possédait, et pouvait ainsi mieux le mesurer.
La déesse marquait des points. Concernant la survie d'un guérisseur, concernant leur sort imposé à tous deux, concernant les motivations d'Athéna... Pourtant, l'ombre du Lion ne semblait toujours pas satisfaite.
La riposte passive de la déesse fut rude, tranchante au sens propre du terme. Les crocs du roi des animaux rencontrèrent un mur aiguisé, s'y écrasèrent. Azir sentit ses doigts transmettre à son corps une douleur intolérable tandis qu'il s'entaillait lui-même avec fureur. Il allait pousser un juron, mais Athena le prit de vitesse et amorça son geste. Le blondinet n'eut que le temps de croiser les bras devant son visage, protéger instinctivement ce dernier ainsi que sa gorge. La force de l'impact le repoussa en arrière, ses pieds traînant dans le sol de terre battue dans un nuage de poussière. Il heurta l'un des murs de l'arène de plein fouet, s'y enfonça au point qu'un cratère se forma dans son dos, avant de retomber mollement.
**Elle confond le doute et l'anticipation stratégique.**
Le Cinquième gardien ne répondit pas, même en pensée, trop occupé à retrouver le souffle que le choc lui avait coupé. Quand il y parvint enfin, sa priorité alla à examiner les sillons de sang sur ses mains qui inondaient à présent ses brassards dorés. L'armure avait encaissé le gros de l'attaque -heureusement-, mais la chair rencontrant l'épée ruisselait à présent.
"Arh... Et dire que je pensais avoir bien progressé..."
Il positionna ses paumes l'une au-dessus de l'autre, inspira à fond le temps de se concentrer. La douce lumière dorée qu'il connaissait vint se répandre autour de ses paumes maculées et la douleur perdit en intensité, tandis que les blessures se refermaient sous l'impulsion de son cosmos. Le Lion releva la tête. Elle allait forcément être déçue après cela. Pourquoi cet état de fait le contrariait-il autant ? Pourquoi tenait-il à la satisfaire, à lui plaire ainsi ?
Ses mains revenues à peu près à la normale, il s'aida du mur pour se remettre debout. Le sang semblait suggérer qu'il avait plongé les bras dans un lac de sang -ou de sauce tomate drôlement réaliste-, pour ensuite tracer des signes sur la pierre. Un mauvais remake d'Harry Potter auraient dit certains.
"Comment peux-tu craindre qui que ce soit avec une force pareille, hein Athéna ? Je suis sûr que tu ne te bats même pas à fond..."
Encore dans la lancée de son attaque, le Lion n’eut pas eu le temps d’esquiver la riposte d’Athena et percuta de plein fouet l’un des murs de l’arène. La jeune femme se préparait déjà à parer ou esquiver le prochain assaut d’Azir, mais celui-ci semblait avoir d’autres idées en tête. A savoir ; reprendre son souffle et guérir ses plaies. La déesse hésita, considérait-il l’entrainement comme fini, ou essayait il juste de se guérir avant de reprendre. Elle avait encore les muscles tendus, prêt à l’action, et se sentait presque frustrée à l’idée de s’arrêter là alors qu’elle commençait à peine à lutter un peu plus sérieusement. Ceci dit, elle n’était satisfaite que lorsqu’elle finissait à bout de souffle, couverte de poussière et de blessures et sans la moindre once d’énergie dans les muscles. Mais le jeune homme venait à peine de les rejoindre, il n’aurait jamais assez d’endurance pour rivaliser avec elle. Finalement, le chevalier d’or parla. Il semblait déçu de ne pas être plus fort que ça, avant de lui poser une question. Ok, donc ça voulait dire qu’ils s’arrêtaient là ? Réprimant une grimace déçue Athena se redressa et s’efforça de rester humble en répondant :
« Ne soit pas si dur avec toi. Je m’entraine depuis mes neufs ans à me battre pour le Sanctuaire. En plus de ça, j’ai la puissance d’une déesse à présent. Tu ne peux pas te comparer à moi alors que tu es à peine devenu chevalier d’or et que tu débutes ton entrainement. J’ai promis de t’entrainer, je ne compte pas m’arrêter là. Je t’aiderais à devenir un Lion redoutable. Et puis, tu as aussi tes capacités de soin à côté.
Elle laissa son cosmos redescendre avant de reprendre :
- Je considère chaque adversaire comme ayant le potentiel de me battre. Ca m’évite de les sous-estimer et d’avoir de mauvaises surprises. C’est la première leçon que j’ai apprise en commençant mon entrainement. J’étais une sale arrogante à l’époque, je pensais que personne n’étais à ma hauteur, pas même mon mentor qui aurait put porter une armure d’or si elle avait voulut. J’ai appris la modestie de la manière forte…
Elle réprima un frisson en songeant à son combat contre Serafina. L’italienne lui avait mit une sévère dérouillée, et elle n’avait même pas été essoufflée. Depuis ce jour, l’américaine s’efforçait de ravaler sa fierté. Ou du moins, de la contenir suffisamment pour ne pas prendre la tête aux autres. Elle s’arracha à ses pensés et sourit :
- Bien. Je pense qu’on va pouvoir s’arrêter là aujourd’hui. Rentrons au Sanctuaire. Si jamais tu as la moindre question supplémentaire, n’hésite pas à me demander, que ce soit maintenant ou plus tard. Ne te sens pas intimidé parce que je suis une déesse et que j’ai l’air occupée. J’ai la fâcheuse tendance à toujours me trouver du travail pour m’occuper. »
Les épaules du blondinet s'affaissèrent, marquant clairement sa déception vis-à-vis du combat -et surtout de lui-même. Même si elle avait raison, même s'il ne pouvait techniquement pas atteindre son niveau, il demeurait évident que sa puissance n'avait rien de remarquable.
"Je ne peux pas me targuer d'avoir battu des apprentis et des chevaliers de bronze ou d'argent... On attend plus de moi, tout le monde ici me le fait savoir plus ou moins subtilement ! Et tu as toi-même dit qu'il y avait Eris ! Quelque chose d'imminent ! Je ne veux pas mourir simplement par manque de préparation ou d'entraînement."
Il serra ses poings ensanglantés et se retint de donner un coup de poing qui aurait pulvérisé le mur de l'arène -une fois de plus. Il fallait qu'il trouve quelque chose, il fallait qu'il devienne plus fort sous peine, comme elle l'avait souligné, que les ennemis du Sanctuaire le réduisissent en charpies sans chercher à savoir s'il un guérisseur ou un combattant.
"Excuse-moi d'insister mais je ne suis pas satisfait de cet échange... Nous avons chacun lancé notre assaut, je suis vaincu, et c'est tout ? Comment dois-je faire pour m'améliorer ? Si tu t'en vas, si je m'entraîne tout seul, comment vais-je savoir si je suis la bonne voie ? N'as-tu pas... je ne sais pas, un conseil, un exercice à me donner ? S'arrêter juste après avoir commencé... ça n'a aucun sens ! Roue-moi de coups si ça te chante, mais là, je ne suis pas près d'être un bon chevalier d'or..."
Azir savait que son orgueil blessé parlait plus que sa raison, mais la peur de ne pas être à la hauteur, tant face à Athena que face à "d'autres" le poussait à l'action, peut-être aussi à l'insolence. Il manquait probablement de respect à une déesse, mais cette même personne lui en donnait implicitement la permission en lui épargnant le cérémonial genou à terre et les formules de politesse.
Azir était frustré. C’était plutôt évident. Et il ne le cacha pas. Athena l’écouta en silence jusqu’à ce qu’il lui demande des conseils, des exercices, quelque chose pour devenir meilleur, ce court entrainement ne lui suffisant pas. L’américaine ferma les yeux un instant avant de répondre en les rouvrant :
« D’accord. Deux conseils. Premièrement ; n’élabore jamais de stratégie de combat sans avoir d’abord jaugé ton adversaire. Est-ce qu’il se base sur sa force ? Sur sa vitesse ? Sur son endurance ou son agressivité ? Est il plus à l’aise au corps à corps ou à distance ? Laquelle de tes qualités dois tu jouer pour le contrer efficacement ? C’est une fois que tu as sut jauger les faiblesses de ton adversaire que tu peux mettre en place une stratégie de façon efficace. Deuxièmement…
Elle s’approcha de lui et lui donna un très léger coup de poing sur son front :
- Avant un affrontement, que ce soit un entrainement ou un vrais combat, dis-toi que tu VAS gagner. Pas que tu DOIS, pas que tu ESPERES, mais que tu VAS l’emporter. Ca parait rien comme ça, mais ton état d’esprit pendant le combat va jouer une part énorme sur l’issu, va influencer de façon direct sur tes performances. Je ne te demande pas de te surestimer, ou de sous-estimer l’adversaire, mais de ne pas te mettre la pression ou combattre envahit de doutes. Tu peux douter après le combat, je te le conseil, repenser à chacune de tes actions, te remettre en question, te demander ce que tu aurais put améliorer, que tu ais gagné ou perdu. Mais avant, et pendant, tu vas gagner, point. Même les sportifs de haut niveau s’entrainent à penser ainsi avant un match. Tu te donnes un sérieux handicap en commençant par te dire « mes progrès ne seront pas suffisant, j’espère ne pas faire d’erreurs ». C’était justement là ta première erreur.
Elle reprit sa route :
- Je n’ai pas d’exercices particuliers à te donner. Demandes toi juste ce que tu aurais put faire de mieux pendant notre affrontement, et entraine toi de ton côté pour perfectionner ta maitrise du cosmos et améliorer tes capacités physiques. Réfléchit à tes points forts, à tes points faibles, comment profiter des premiers et palier aux deuxième. Ce sera tout pour l’instant. Allez, va te reposer un peu à présent. Et bonne journée.»
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