Trois jours. Était-ce une longue ou une courte période ? Fallait-il donner dans la fanfare de bienvenue ou ordonner une convocation plus officieuse, plus discrète ? D'ordinaire, avec les jeunes recrues de bronze ou d'argent, il y avait un protocole assez bien défini, une passation via les sergents instructeurs, un petit tour de la Palestre, et quelques missions faciles de routine pour s'habituer et prendre ses marques.
Là, il s'agissait d'accueillir l'un des Douze en étant à la fois égal et légèrement supérieur à lui en termes de rang, de nouer un lien plus étroit également avec Jamir qui avait tendance à laisser filer le temps si on ne revenait pas solliciter des rapports ou un contact un peu plus terre-à-terre. Et en plus, il s'agissait là de l'armure la plus duale de toutes, portée auparavant par nulle autre qu'Eurydice, qui avait en quelques sorte réparé les pots cassés dans le sillage du combat, ou plutôt de l'exécution amorcée par Reagan. Un exercice de pouvoir délicat à mener avec prudence mais fermeté.
Après ces trois jours d'hésitation, Azir avait fini par couper la poire en deux entre une rencontre officielle mais pas publique, un rappel à l'ordre et une explication simple pour un étranger qui manquait peut-être de contexte. Partiellement, puisqu'il officiait déjà comme un guerrier particulier dans les rapports transmis au Sanctuaire. Le mieux pour se rendre compte de tout cela était d'aller à sa rencontre.
C'est ainsi que le blondinet avait décidé de se rendre dans la demeure nouvellement habitée de son homologue des Gémeaux en tenue décontractée : bottes et cuirs prêts pour l'entraînement, confortables également pour la vie quotidienne d'un Sanctuaire antique. Chemise pratique, propre, élégante mais pas ostentatoire. Dans ses cheveux, les habituelles pierres qui maintenaient quelques tresses en place, plus ornementales que réellement insignes de pouvoir. Il avait laissé la toge, le casque, le masque et l'attirail de Grand Pope en général au palais, bien que la déesse l'avait autorisé à le porter dans le cadre de ses fonctions.
Il s'était arrêté un instant face au haut temple, la lumière accrochant sa crinière comme pour y nicher, répétant quelques amorces qu'il pourrait utiliser pour mettre son interlocuteur. Il pénétra la place, attirant rapidement par l'écho de ses pas le regard d'une servante occupée à porter un seau d'eau fumante -pour un bain ? Hécate donc, l'informa de l'indisponibilité temporaire de son maître, mais elle se hâta d'informer ce dernier, avec comme consigne de simplement annoncer "un chevalier d'or" afin de ne pas brusquer le nouveau venu.
Quand enfin Meruem se présenta, avenant, le Lion d'or ne put s'empêcher de noter combien les bijoux contrariaient l'idée d'un assassin discret et anonyme. Cela devait le gêner en combat également : on avait vite fait de laisser tomber une boucle d'oreille ou de casser un collier. Mais tant qu'il accomplissait correctement son devoir, Azir n'était pas là pour juger l'apparence des guerriers d'Athéna.
Il lui rendit son sourire, son regard améthyste verrouillant celui des Gémeaux avec curiosité.
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Bienvenue au Sanctuaire, Meruem. J'ai ouï dire que nous avions un nouvel arrivant parmi le Cercle d'or, ce qui n'est pas anodin, mais je m'étonnais de ne pas l'avoir encore vu gravir les temples pour se rendre chez le Pope. Alors je suis venu voir comment se passe l'installation. Je m'appelle Azir. J'espère que l'endroit te convient, il est vrai que l'ambiance du Sanctuaire est assez en marge de ce que proposent les logements citadins de nos jours."