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Douloureux souvenirs du passé,
Resserrant leur emprise invisible.
Ineffable sentiment d’inconfort,
Scellant les amarres du destin.
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Cela faisait déjà plusieurs mois que l’Atlantide avait sombré, ne restant plus qu’un souvenir dans les tréfonds de la mémoire du dernier des Marinas. Que ce soit avec une connotation bonne ou mauvaise, Hakon représentait désormais l’un des rares vestiges vivants d’une civilisation antique et d’un ordre guerrier aujourd’hui disparu. De la nostalgie, il en ressentait un peu alors que le navire s’approchait des quais laissés à l’abandon depuis la catastrophe. Tant de vécus, autant bons que mauvais, tous représentant la somme de l’expérience acquise par l’ancien Kraken au fil de ces premières années de services en qualité d’éveillé.

Comme il pouvait s’y attendre, l’effondrement de la cité sous-marine avait laissé des stigmates palpables : l’organisation géométrique de la cité métallique de la surface avait été bouleversée, vraisemblablement par un cataclysme sous-marin de grande ampleur - un raz-de-marée ou un tourbillon marin peut-être… Le phénomène avait dû rester localisé, apparemment sans impact majeur sur les côtes les plus éloignées. La plateforme flottante la plus gigantesque demeurait bien évidemment l’ancien quartier administratif, cœur névralgique de la cité abritant l’imposant building de la Paradius Corp, dont le bureau et les appartements privés du seigneur des sept mers siégeaient au dernier étage.

Le décor ressemblait assez aux rues des villes désertes et dévastées de ces films post apocalyptiques du cinéma des hommes. Aucun doute que des scènes de pillage avaient dû avoir lieu ici, avant ou après la catastrophe – un cadavre au coin d’une rue servait de pitance aux oiseaux et autres vermines rampantes ayant repris leurs droits. Pourtant, l’évacuation ordonnée aurait dû éviter ce genre de scène morbide… La cupidité de certains les aura sans doute poussés à continuer leurs affaires malgré le danger bien palpable pesant sur eux, les rendant vulnérables et à la merci du sinistre lié à la disparition de la Cité aux mille joyaux. Finalement, le jeune Pope ne s’émouvait plus pour ce genre de scène ou toute autre considération terre-à-terre. Peut-être avait-il perdu de son humanité au fur et à mesure des épreuves et des pertes associées… Peut-être était-il parvenu à se détacher des paradigmes humains pour s’élever à une pensée d’un niveau cosmique plus large… Ou peut-être un peu des deux…

La construction de l’improbable immeuble central de New Atlantis avait du être très onéreuse au regard de la solidité apparente et effective de l’édifice. Ce dernier avait subi les conséquences de la disparition de Poséïdon comme toutes les autres structures de l’île artificielle, et pourtant il demeurait droit et imperturbable, tel un obélisque ayant franchi les époques pour raconter son histoire aux hommes de ce siècle. L’électricité avait cessé d’être produite et d’alimenter les bâtiments, l’eau potable n’était plus générée et les maigres réserves encore existantes devenues insalubres, certains des navires supports externes présentaient même des signes de voies d’eau et menaçaient de sombrer à terme : pour récapituler en quelques mots, le complexe insulaire n’était plus viable et ne le serait peut-être plus jamais.

L’ascenseur ne fonctionnait plus – les escaliers représentaient désormais le seul moyen d’accès vers les étages supérieurs de la tour…

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Le temps ondule paisiblement,
Telle une onde sur un lac miroir.
Le passé s’agite promptement,
Tel un remous au fond de l’eau.
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Il semblait évident que l’immeuble avait dû subir les assauts brutaux de puissantes vagues, ainsi que de violents vents. La plupart des fenêtres avait été détruites par les agressions successives des éléments, même si la construction dans son ensemble s’en était sortie relativement indemne. Les murs et escaliers intérieurs étaient recouverts de cristaux, résultant de l’évaporation de l’eau, diffusant une odeur âcre d’iode et de sel dans l’atmosphère. De la moisissure s’était formée en abondance dans ce milieu chargé d’humidité et à la température des plus propices.

Arrivé au dernier étage de l’édifice, l’ancien atlante demeura immobile quelques minutes dans le hall d’accueil, observant la pièce avec les yeux du passé, se remémorant la première fois où il avait pénétré en ces lieux, les personnes rencontrés ensuite, les émotions qu’il avait pu ressentir à chaque fois, et plus encore. La dernière fois qu’il avait œuvré dans la pièce principale, c’était pour démanteler l’organisation atlante avant l’effondrement du royaume sous-marin, sans doute la meilleure décision qu’il avait pu prendre compte tenu des circonstances. Il espérait que son acte avait pu éviter la mort inutile de la plupart des anciens fidèles, si ce n’était la totalité, du maître des sept mers. Ainsi, l’Atlantide avait sombré avec son imbécile de capitaine…

S’il avait décidé de revenir faire une petite escale à cet endroit, ce n’était pas tant pour des raisons nostalgiques que pour récupérer un objet bien particulier. Même s’il n’était pas encore très certain de la raison profonde qui le poussait à braver son passé, il n’en était pas moins convaincu que ce qu’il recherchait représentait son héritage et ne devait en aucun cas tomber dans des mains incultes ou indignes. Visiblement, ses craintes s’étaient concrétisées au regard du beau bazar dans les appartements privés de l’ancien, et non moins illustre, propriétaire des lieux. Deux hommes d’origine cubaine gisaient au sol, récemment abattus par balle selon l’état des corps – quelques jours, peut-être une semaine, mais guère plus. Ces deux là s’étaient peut-être fait doubler, ou avaient été témoins de quelque chose qu’ils n’auraient jamais dû voir, ou encore pouvait-il s’agir d’une rivalité entre pillards concurrents. Hakon prit soin de prendre plusieurs clichés de la scène, avant de fouiller les cadavres précautionneusement en quête de quelques précieuses informations sur l’identité des deux victimes.

La plupart des biens exposés par le seigneur des océans avaient étaient détruits par les évènements ayant succédés à la disparition de la cité sous-marine. Néanmoins, certaines œuvres d’art, ou encore des biens précieux à ces yeux divins comme quelques bouteilles d’alcool rares et intemporelles, étaient entreposés dans une pièce sécurisée, avec une localisation centrale vis à vis de l’étage. Ladite pièce semblait présentement bien vide par rapport à l’inventaire initial dont le finlandais se souvenait. La plupart des biens conservés ici n’auraient de valeur marchande que pour des collectionneurs invétérés, à l’exception de l’objet de ses recherches, lequel possédait des caractéristiques cosmiques très particulières en plus d’être devenu unique après le grand cataclysme atlante. La larme d’Atlantis n’était plus à sa place – il était temps de rentrer à Cuba pour partir sur ses traces…