Le Lion d'or était resté un instant plein de fascination en voyant l'objet antique rassembler ses morceaux comme s'il savait précisément quoi faire et comment. L'idée lui vint qu'il s'agissait là de la magie ancestrale de son peuple -quoi que pouvait en dire Hruodland avec cette histoire de couleur d'yeux. L'idée-même de parler d'un seul peuple venu des lointaines années précédant le terme d'Histoire n'était en fait pas exacte tant il y avait eu de métissages au fil des siècles, mais le Saint appréciait le romantisme du moment. Pourquoi fallait-il que la résurrection d'Anubis passât par tous ces sacrifices ? S'il était venu pacifiquement...

Le blondinet secoua la tête. Mieux valait étouffer les "si" et l'idéalisme infondé dans l’œuf. Au premier mort, vouloir faire preuve de fraternité n'avait plus eu lieu d'être. Ce qui était ironique quand on savait qu'il s'adressait à une déesse qui avait eu besoin pour son réveil d'éliminer une petite ville.

Puisqu'il avait été désigné à demi-mot -ou plutôt forcé par Zlatanna- pour être le gardien de la tablette, le Lion d'or s'avança pour récupérer l'artfefact désormais entier, lequel encombrait ses bras avec brio. Il pouvait sentir sous ses paumes la puissance courir, songea que s'ils faisaient une erreur le dieu des Morts de l’Égypte ancienne retrouverait alors ses pouvoirs et sa souveraineté. Un événement pas forcément bénéfique.

***Un grand pouvoir, de grandes responsabilités, et caetera.
-Réjouis-toi, on ne pourra plus te traiter de lionceau après cela.***

Azir eut un temps d'arrêt, jaugeant si l'esprit se moquait de lui ou non. Il se tourna ensuite vers les autres, qui délaissant la mission, qui suggérant le repos et qui l'attaque. Il lui revenait donc de trancher d'une certaine façon.

"Merci pour votre aide et votre bienveillance, Dame Uskyld. Nous n'abuserons pas plus longtemps de vos terres et du droit d'entrée que votre dieu nous a accordé."

Il échangea un signe de tête avec la jeune femme blonde puis se tourna successivement vers les deux autres.

"Nous retournons donc effectivement en Égypte. Je sais que vous avez hâte Hruodland, mais laissez-nous juste le temps de nous assurer que l'évacuation est terminée et que les autres Éveillés coopéreront. C'est tout ce que je vous demande. Quand Our sera à l'air libre, vous en ferez ce que vous voulez. Je le jure sur son honneur de chevalier d'Athéna. A présent cap sur le point de rendez-vous, il ne faudrait pas manquer Leticia."

Uskyld faisait preuve de beaucoup d’optimisme quant aux progrès de l’évacuation des civils, tandis que l’ex-Léviathan voyait la chose avec son indifférence coutumière – ce qui était tout de même mieux que le mépris qu’il affichait auparavant. Si seulement les choses pouvaient être si simples, mais Zhihao ne s’attendait pas à ce que les résidents d’Asgard mesurent toute l’énormité du défi logistique que représentait le déplacement de plus d’un million de personnes, surtout dans un pays comme l’Égypte.

« Les médias parlent peut-être de mettre les civils en sécurité depuis deux jours, mais les informations sur la portée probable de la prochaine explosion sont connues depuis moins d’une heure. J’ai bien peur qu’on ne puisse pas évacuer tout le monde dans un rayon de cent kilomètres d’un claquement de doigts. » remarqua sombrement la militaire avant de s’incliner légèrement devant la nordique, se joignant aux remerciements d’Azir. Ceci fait, le Lion chargé de son précieux fardeau prit la tête du groupe pour rejoindre la frontière, d’où ils pourraient contacter la Spectre et regagner El Balyana.

Il restait néanmoins une mise au point à faire, et celle-ci promettait d’être désagréable, mais il faudrait bien s’y résigner : la chasse aux fragments de tablette avait été plus rapide que prévu, laissant peu de temps au gouvernement égyptien pour faire ce qui devait être fait, et la Boussole doutait que qui que ce soit puisse convaincre le bouillant Guerrier Divin de patienter davantage.

Avec leur vitesse d’éveillés, il ne leur fallut pas longtemps pour traverser le paysage enneigé et rejoindre le village ; l’asiatique attendit qu’ils aient repris une allure plus normale pour aborder le sujet qu’elle avait espéré pouvoir éviter, non sans avoir d’abord envoyé un second message au Fourneau pour que celui-ci prévienne Leticia qu’ils étaient prêts à revenir.

« Au cas où nous devrions donner l’assaut avant que l’évacuation ne soit terminée, je préférerais certes éviter les dommages collatéraux mais Hruodland a malheureusement raison, notre priorité doit être d’arrêter Anubis afin d’empêcher qu’il ne fasse encore plus de victimes. Seulement, il est possible qu’Our ou l’un de ses camarades ait un moyen de déclencher l’explosion manuellement, sans attendre que quelqu’un frappe la barrière, ou prétende que c’est le cas et qu’il s’en serve pour prendre la population en otage. Hruodland, je sais que si l’un d’entre nous cède à ce chantage vous le tuerez, vous avez été très clair là-dessus, mais ce serait déjà une victoire pour Anubis : notre groupe en serait diminué et Our pourrait profiter de cette distraction pour fuir, nous frapper dans le dos ou que sais-je encore. Azir, j’ai besoin d’être sûre que vous et Colombe garderez la tête froide si les choses doivent en arriver là ; je me charge de Gorislava, et Leticia… c’est une Spectre mais on ne sait jamais. »

Il y avait également la possibilité de faire semblant de céder au chantage pour pousser Our à baisser sa garde, mais l’ancien Marina accepterait-il l’utilisation d’un tel stratagème ? Cette considération devrait attendre, car le trio avait franchi le gigantesque mur délimitant le territoire d’Odin et arrivait au point de rendez-vous, juste à temps pour que la Mante fasse son apparition et les emmène dans leur troisième – et dernier, avec un peu de chance – voyage interplanaire de la journée.